jeudi 5 juillet 2018

Courtiser à l'africaine

 
Que l'on fasse parti de ces femmes qui trouvent les Africains collants, ou de celles qui croient que l'amour n'a pas de couleur, on ne peut nier que l'approche de la femme convoitée diffère drastiquement entre le Québécois et l'Africain.  Mais pourquoi donc?
Avant d'essayer d'expliquer le comportement de l'autre, il est important de reconnaître ses propres habitudes.  Comment ça se passe entre 2 Québécois en gros?  On le sait, on est une société marquée par le féminisme, ou les hommes ont parfois peur d'affirmer leur virilité sous peine d'être taxés de machos ou de gros colons.  Tout se fait donc dans une subtilité qui peut à la limite être agaçante pour les femmes.  Parfois, on a même l'impression qu'on a beau envoyer des signaux lumineux phosphorescents d'intérêt, les hommes marchent sur des œufs et se retiennent au maximum.  Offrir une bière à une femme est devenu un acte de courage.  Le moment de séparer la facture au restaurant entre un homme et une femme qui viennent de se rencontrer, un terrain miné. Lui faire un compliment, un vrai saut dans le vide! Vous dansez, un homme s'approche en vous regardant, vous lui tournez le dos?  C'est fini, il a compris et son égo est déjà touché avant même de retourner à la table ou ses copains se moqueront de lui.  Pas étonnant que beaucoup de ces gars, pour éviter toute anicroche, se retrouvent dans la friendzone!

 Et imaginez que ça fonctionne?  Peut-être que ce sera la femme qui aura fait les premiers pas, ce qui est pas mal dans la façon de fonctionner au Québec. Vous vous retrouverez un soir dans les bras l'un de l'autre, prolongerez la chose dans la nuit, irez déjeuner le lendemain matin au resto du coin.  Mais vous ne serez pas encore officiellement ensemble.  Ah non!  Parce qu'au Québec, l'amour physique précède de longtemps l'amour du cœur.  De peur d'avoir l'air empressés, vous enlignerez les nuits torrides sans jamais dire cette fameuse phrase fatidique, épeurante, qui peut tout gâcher: '' Je t'aime!''  Et rien ne sera clair.  Nous avons tellement de façon de ne pas être en couple, c'est fou.  Amants, fuckfriends, couple ouvert, polyamour, histoire d'une nuit, d'une semaine, d'un mois, si ça se trouve, vous habiterez pratiquement ensemble ou serez futurs parents avant d'avoir un statut clair.  Et le ''je t'aime'' risque fort de sortir de la bouche féminine avant de n'être murmuré de la sienne. 
Ça c'est notre façon de faire.  Tellement différente de la manière africaine, pas surprenant que les gars qui débarquent de Ouagadougou et qui se retrouvent dans un bar du centre-ville n'y comprennent rien.  Pas étonnant non plus que les Québécoises s'effarouchent des manières assumées de ces hommes qui savent démontrer ce qu'ils désirent.  

 Comment se passe la drague au Burkina par exemple?  Eh bien, il faut savoir que lorsqu'une femme est émue par la présence d'un homme, elle fera tout pour l'ignorer.  Elle ne le regardera pas, ne lui parlera pas, en fait on pourra juger de son attirance a l'inverse proportion de l'attention qu'elle lui donnera.  Elle ne fera absolument jamais les premiers pas, et au contraire, malgré son intérêt certain, elle fera tout pour se montrer difficile d'approche.  C'est à l'homme de montrer sa valeur, son sérieux, en tenant bon, malgré les mauvais traitements qu'elle lui fera subir.  Ce n'est pas une société féministe, ce n'est pas un endroit ou une femme peut faire ce que bon lui semble et être au-dessus des jugements.  Elle doit être sérieuse, garder sa respectabilité, et c'est à l'homme de pousser, de porter sur lui la charge de la chose, comme si elle finissait par accepter a contrecœur.  Il doit sauver les apparences pour qu'elle puisse finir par s'ouvrir, tout doucement, avec le temps.
Si elle accepte d'aller au restaurant avec lui, elle le fera probablement poireauter des heures avant d'annuler bien après l'heure prévue.  Elle viendra peut-être au 3e rendez-vous, très en retard, l'air absent, elle parlera très peu.  Dans le resto ou il l'amènera, y mettant peut-être 2 ou 3 semaines de salaire, elle prendra le repas le plus dispendieux, mangera 2 bouchées et dira qu'elle n'a plus faim.  Même s'il en crève d'envie, il ne prendra pas les restes pour emporter et gardera le sourire.  Il multipliera les ''Je t'aime'', qu'elle ne prendra pas au sérieux, ils ne peuvent effectivement rien vouloir dire.  Elle lui fera payer multiples caprices, du poulet braisé le samedi soir, à la robe de bal, en passant par les frais de scolarité du petit frère.  Vouloir sérieusement une femme Africaine, c'est être prêt à tout accepter, à y mettre le paquet, à voir les enchères monter, et suivre, en serrant les dents, avec le sourire.  Pas étonnant que les jeunes ne se marient pas tôt, ils n'en ont pas les moyens!  Quand il aura rencontré la famille, envoyé 1000 textos, enduré 20 rendez-vous manqués, refait la garde-robe complète de la douce, il aura droit à un baiser.  L'amour physique, avec une femme sérieuse, qui ne se rabaisse pas, sera un acte d'engagement.  Approuvé par les parents, un aboutissement qui donne sur un projet de vie commun.

 Dans un tel contexte, comment voulez-vous que ce même gars, qui vient à peine d'arriver, comprenne que parce que vous refusez de lui donner votre numéro de téléphone, ou de danser avec lui, qu'il devrait se retirer gracieusement et ne plus vous embêter???  Il est formaté a vous démontrer la valeur de son sérieux et il le fait avec respect.  Là où vous voyez de l'insistance, du harcèlement, il voit probablement votre attitude de blanche, polie mais ferme,  pour une coquinerie visant à faire mousser le jeu.  Ou si au contraire, vous êtes intéressée, que vous prenez les devants, et finissez la soirée dans son lit, comment pourrait-il comprendre que vous êtes malgré tout sérieuse, et encore respectable?  Je ne parle pas des gars ici depuis longtemps, qui ont compris la game et savent maintenant la jouer.  Ceux-là peuvent devenir paresseux à la longue, et comprendre qu'au Québec, le moins tu en fais, le plus tu en tires.  Il pourra gouter à la joie du non-engagement national, quitte à attendre de rentrer au pays plus tard pour se marier avec une femme '' sérieuse '', selon les règles qu'il connait et respecte.
La parade amoureuse n'est pas sans couleur et sans odeur.  Mélanger les épices, locales et exotiques se fait parfois avec risque, on commet des gaffes, et des fois, de vrais chefs-d'œuvre. 



 Vous voulez en apprendre plus sur le Burkina Faso ou l'auteure du blog?  Vous pouvez vous procurer son roman " Seul le poisson mort se laisse porter par le courant " sur www.evelavigne.com ou www.smashwords.com Amazon, iTunes, Kobo et tous les autres grands distributeurs.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire