dimanche 9 juin 2013

Être femme au Burkina Faso, de Monique Ilboudo

Maître-assistante à l'Université de Ouagadougou, titulaire d'un doctorat en droit privé obtenu à La Sorbonne, Monique ILBOUDO a débuté sa carrière en créant et animant de 1992 à 1995 la chronique "Féminin Pluriel" dans le quotidien burkinabé "L'Observateur Paalga". En parallèle, elle a mis en place un Observatoire sur les conditions de vie des femmes au Burkina Faso, intitulée "Qui-vive". Impliquée dans la vie politique de son pays, Monique ILBOUDO a tout d'abord été membre du Conseil Supérieur de l'Information de 1995 à 2000 avant d'occuper le poste de Secrétaire d'État chargée de la promotion des Droits de l'Homme. Elle est l'auteur de nombreux essais qui ont contribué à lever des tabous liés aux traditions de son pays et plus largement de l'Afrique.
En 1992, elle publie "Le Mal de Peau" (éd. Le Serpent à plumes), devenant ainsi la première
romancière du Burkina-Faso. Réédité en 2001, cet ouvrage a reçu le Grand Prix du meilleur roman burkinabé.

Monique Ilboudo est actuellement ministre des Droits humains du Burkina Faso.

Je viens de terminer son livre "Être femme au Burkina Faso" des éditions du remue-ménage, publié en 2006 et certains extrait m'ont parus tellement fort que j'ai eu envie de vous les mettre en citation.



"Le crapaud et ce que contient son ventre appartient au Boa" affirme un dicton mossi pour signifier que la femme et ses enfants appartiennent  au mari."




"Quand un homme est opprimé, a dit Talisma Nasreen (bangladesh), on parle d'oppression, mais quand les femmes sont torturées, violées, opprimées, on appelle cela la tradition. Et la tradition, il ne faut pas y toucher, particulièrement en Afrique, et surtout lorsque cela concerne la situation des femmes"


"Le contrôle de l'esprit
Selon la tradition de plusieurs communautés au Burkina Faso, la mort de tout être humain doit être élucidée.  Pour les vieilles personnes, on conclura que le défunt a rejoint les ancêtres; pour des personnes plus jeunes, soit elles ont failli à la tradition (mort sanction), soit leur âme a été dévorée par des sorciers. Dans le premier cas, la société organisera des funérailles afin que l'esprit du défunt ou de la défunte puisse intégrer le domaine  des ancêtres.  Dans le deuxième cas, des cérémonies seront organisées afin que l'esprit du défunt puisse bénéficier du pardon des ancêtres.  Pour le troisième cas, la société cherchera le coupable, et des sanctions sont prévues.  Ces sanctions varient selon les communautés.  Avec l'évolution (la rencontre avec d'autres système de pensée, avec d'autres religions...), certaines pratiques ont été abandonnées.  Mais dans certains milieux, la croyance en la sorcellerie demeure et les "prétendus coupables" sont bannis.  Dans la quasi totalité des cas, ces coupables sont des femmes, de vieilles femmes."  [...] 

"Au Burkina Faso, le phénomène reste encore vivace, notamment avec les épidémies de méningite, de choléra et de rougeole ainsi que la pandémie de VIH-SIDA qui font de sérieux ravages en vies humaines, ce qui entretient un climat de méfiance et de suspicion à l'égard des vieilles femmes."


"L'école des filles

Dans la famille, les petites filles sont traitées différemment des garçons dès leur naissance.  Leur venue au monde est très souvent moins bien accueillie que celle de leurs frères.  Si chez nous on ne pratique
pas l'infanticide sélectif, les termes utilisés pour désigner les filles que celles-ci n'ont pas vraiment leur place au sein de la famille.  Lorsqu'une petite fille vient au monde on dira par exemple que c'est une étrangère, pour bien montrer qu'elle est destinée à partir. 

L'éducation de la petite fille est marquée par la volonté de tuer toute velléité de résistance.  Elle doit être plus obéissante, moins rebelle.  Ce qui est qualité chez l'un, signe de virilité, est défaut chez l'autre.  La petite fille est, en outre, très tôt responsable des nombreuses taches domestiques, ce qui l'empêchera de disposer de temps pour jouer ou pour réviser ses leçons.  Elle sera moins préparée que ses frères pour affronter la vie extérieure. "


"Yennenga, fondatrice d'empire


Cette jeune fille est une Peule, un peuple vivant au Burkina et dans toute la région sahélienne.  Ce peuple ne s'identifie pas à la légende de Yennenga, mais la photo étant si belle, j'ai trouvé qu'elle avait l'air d'une princesse!
La légende de la fondation de l'empire des Mossis fait intervenir une femme: Yennenga.  Cette princesse, fille unique du roi de Gambaga (dans l'actuel Ghana) s'était lassée du célibat que lui imposait son père, dont elle était la meilleure cavalière et guerrière.  Elle tenta de le signifier à son père, par des signes.  Elle sema notamment du gombo, et s'abstint  d'en récolter le fruit lorsque celui-ci vit à maturité.  Lorsque son père l'interpella là-dessus, elle en profita pour lui demander pourquoi elle-même, ayant depuis belle lurette atteint l'âge du mariage, n'était toujours pas mariée.  Son père resta sourd à sa revendication. 




Un jour, elle s'enfuit sur son étalon Ouédraogo.  Au bout d'une course effrénée dans la savane, elle rencontra Rialé, un chasseur dont elle tomba amoureuse.  Elle resta au près de lui et ils eurent un fils qu'ils nommèrent Ouedraogo, en souvenir de l'étalon de Yennenga.  Ouedraogo est le fondateur du royaume des Mossis.

Aujourd'hui, Yennenga est une héroïne considérée comme l'image de la rébellion féminine, mais cela est sans conséquences de la situation réelle des femmes de cette ethnies.  Yennenga reste un mythe inaccessible pour les autres femmes Mossis invitées à plus de docilité.  Tout comme il n'y a qu'une sainte vierge conçue sans pêché, il 'y a qu'une Yennenga, guerrière, rebelle, qui enfante par amour et hors mariage tout en restant respectable."




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Bonne lecture!

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